jeudi 11 août 2011

Laissez la Grèce tranquille !

Alors que la Grèce s'enfonce dans la récession économique et la régression sociale, les critiques s'abattent sur le pays. Qu'elles émanent de la donneuse de leçons de bonne conduite en chef - l'Allemagne - ou de la tyrannique Commission de Bruxelles, celles-ci me m'apparaissent comme étant extrêmement cruelles pour le peuple grec. Cependant, au lieu  de s'attacher au diagnostic largement rependu qui consiste à expliquer doctement à qui voudra l'entendre que « la Grèce a triché, elle doit maintenant le payer », il convient d'examiner au préalable pourquoi la Grèce est dans un tel état d'une part, et de se demander, dans un deuxième temps,  si l'action de l'Union européenne lui est vraiment bénéfique d'autre part.

La « solidarité européenne » est, aux yeux des européistes, une réalité symbolisée par les « plans d'aides » successifs que les États ont mis en place pour « aider » la Grèce. La canaille souverainiste n'a qu'à bien se tenir ; et admirer la manière avec laquelle la magnifique Union sauve le mauvais élève. A coups de milliards. Tant et si bien d'ailleurs que la France en faillite décrite par M. Fillon n'hésite pas à sortir le chéquier à hauteur de 16 milliards pour rembourser en fait les créances des banques sur la Grèce. Ainsi les plans qui se succèdent n'aident-ils pas la Grèce ; ils aident les banques. On sait d'ailleurs que les banques françaises sont très largement engagées... Des sommes colossales et totalement délirantes ont été engagé  par l'UMP et le PS... décidément hors des réalités économiques. Ces réalités, quelles sont-elles ? D'une part, jamais un pays en grave crise n'a pu s'en sortir sans dévaluation au préalable de sa monnaie. Nous avons l'exemple de la politique de Laval pendant la grande crise qui conjuguait politique de rigueur et politique du Franc fort.  Grave échec. D'autre part, on sait que les monnaies pluri-nationales sont vouées à l'échec. Deux constats qui auraient pu éviter les erreurs de politique économique et monétaire de ces dernières années.

Aujourd’hui, les eurobéats ne défendent plus l'euro ; ils font peur. Et quand ils le défendent, ils le font sans argumenter mais en affirmant : sans l'euro ce serait pire, l'euro nous protège [...]. Point à la ligne. M. Barroso eut même, récemment, le culot de reprendre (implicitement) le célèbre There is no alternative en expliquant que la seule solution pour la Grèce, c'était celle que préconisait les « experts » de Bruxelles. Toutefois, comment peut-on accorder le moindre crédit à des gens qui nous ont expliqué que le modèle espagnol était à suivre, évoquant même parfois le modèle irlandais en termes de fiscalité ? Si la critique souverainiste de la crise repose aussi sur l'euro, les européistes nient en bloc toute responsabilité de la monnaie unique dans cette même crise. Pendant qu'ils tentent d'enfumer les peuples en leur expliquant que le taux de change n'a aucun impact sur la croissance, les américains amortissent la crise - pourtant dure - en voyant le marché européen continuer de s'ouvrir ; la Chine continue de jouir d'un marché offert via un Renmibi sous-évalué et des coûts salariaux misérables.




L'examen du cas grec est sans appel : l'économie grecque n'a aucun avantage comparatif. Ce n'est pas une économie  très dynamique, et le marché au noir y est fort développe. Cependant, la Grèce reste un État souverain et n'a pas conséquent aucun compte à rendre. Si les européistes estiment que la Grèce se comporte si mal que ça, qu'elle quitte la zone euro. Malheureusement, cela briserait (plus tôt que prévu) la monnaie unique. Ils ne veulent pas sauver la Grèce à qui ils témoignent un profond mépris, mais les banques comme nous l'avons dit et... l'euro. Regardons comment l'Allemagne parle des grecs : ils prennent trop de vacances. La réciproque n'est pas mieux, les grecs parlent du IVe Reich. Les commentateurs, MM. Minc et Quatremer ne sont pas en reste. Voilà l'état actuel de la « solidarité européenne ». Or, la vraie solidarité aurait consisté à laisser la Grèce quitter l'euro, tout en essayant d'amortir le défaut grec - au lieu de le repousser à coups de milliards comme aujourdh'ui. Non, car aux yeux des européiste, la solidarité ne peut s’exercer que dans le carcan de l'euro qui est d'ailleurs aujourdh'ui devenu le garant de la paix Europe selon certains ! J'ai tenté d'expliquer plus haut que les européistes, quand ils ne débattent plus à coups d'affirmations non-argumentées, choisissent la méthode de la peur. Ruine, retour au Moyen-Âge, faillite, tensions entre les peuples européens, seraient les conséquences inéluctables de la fin de l'euro. Encore une fois, l'histoire économique nous enseigne qu'une séparation monétaire n'est pas synonyme de guerre. Ainsi des exemples soviétique et  tchécoslovaque : une séparation monétaire n'est pas forcément synonyme de guerre et de tension.

En tout état de cause, parce qu’il est trop cher et absolument pas adapté à l'économie grecque, l'euro mine la compétitivité - déjà faible - à l'export de la Grèce ; bride toute reprise économique possible et rend impossible le remboursement de sa dette. C'est un cercle vicieux que nous avons là : la récession enclenchée par la Troïka accentue le chômage, nourrit les déficits et donc la dette. Pour l'aider, les autres États européens s'endettent toujours plus. Les leçons de morales et le dédain des européistes vis-à-vis du peuple grec sont clairement liés à la peur de voir leur joujou, l'euro, s'effondrer à cause des grecs - aidés dans leur triche par Goldman Sachs, dont l'ancien dirigeant n'est autre le futur gouverneur de la... BCE : Mario Draghi. En d'autres termes, toutes les mesures visant à faire s'affaisser la demande - le modèle allemand - se révèlent contre-productives. Dans le cas grec, justement, procéder à des mesures barbares comme la baisse des salaires dans la fonction publique tendent à abaisser la demande globale, donc la consommation et la production. Ces gens-là n'ont visiblement pas lu - ou compris ? - Keynes.  Notons toutefois que l'inflation est faible et que la monnaie reste chère par rapport au dollar et au yuan. Les fétichistes de la monnaie chère et de l'inflation faible peuvent donc dormir tranquilles avec une BCE toujours indépendante et dont le mandat exclut tout objectif d'emploi de croissance.

dimanche 17 avril 2011

Que penser du Revenu citoyen ?

C'est donc le nouveau reliquat de Dominique De Villepin. Sensé transformer l'ordre social, il assure à tous les citoyens un revenu minimum de 850€, et dégressif jusqu'à 1500€. Cette idée, du point de vue de la théorie économique peut paraître géniale car elle créée un consensus inespéré - sur certains points - entre les libéraux d'une part, et les socialistes de l'autre. Nous y reviendrons. Néanmoins, dans la réalité, il semble impossible de dire ce qui se passerait si il était instauré, tant les préjugés sont nombreux à ce sujet. Ainsi entendons-nous régulièrement que les gens s'arrêteront de travailler, par exemple. Dans la rédaction de ce billet, il m'a semblé judicieux de confronter des arguments issus de la théorie économique, mais aussi certains arguments du libéral Guy Sorman, et du très keynésien Bernard Maris. Enfin je rajouterai des arguments qui complèteront l'analyse.

Comme le souligne judicieusement le blogueur Yann, cette idée est jugée bénéfique par les plus libéraux. En effet, celle-ci ferait coup double. D'une part, elle permettrait l'arrêt de la fraude aux aides sociales : le paradis libéral ! D'autre part, elle pourrait conduire à la fin de mesures comme le SMIC et simplifierait les attributions d'aides sociales. Autrement dit, fin du clientélisme selon eux. Expliquons nous. Dans un monde où tout le monde toucherait une certaine somme, ici 850€ ; en l'absence d'autres allocations, il serait inutile d'essayer de travailler moins pour gagner moins et de fait, toucher les aides sociales. De là la célèbre scène mimée par Reagan où il met en action un salarié qui supplie son patron de lui baisser son salaire afin de bénéficier des aides sociales. Certes, tous le monde n'en profite pas alors que dans l'optique libérale tout le monde - même les riches - devrait en profiter. Cependant étant donné sa dégressivité, pas grand monde serait tenté de passer sous la barre des 1500€ pour gagner quelques euro de plus. Et puis, étant donné la dignité qu'il confère, même en période de chômage cela pourrait conduire à la suppression du SMIC souhaitée par les libéraux. En outre, on peut imaginer que si De Villepin était élu président de la République, celui-ci ferait appliquer cette nouvelle loi tout en supprimant les aides pléthoriques que l'État offre aujourdh'ui. On peut penser aux APL, par exemple, qui sont des subventions directes à la rente, aux aides pour les handicapés, le minimum vieillesse, et bien sûr le RSA. Ce faisant, si le coût du Revenu est estimé à 30 milliards - ce qui peut susciter l'effroi de certains à la vue de notre dette publique - la rigueur intellectuelle des détracteurs du revenu citoyen serait de dire que son instauration ouvrirait la voie à la suppression d'autres aides qui coûtent autant à l'État. Il ouvrirait également la voie à une simplification des procédures d'aides sociales. Toutefois, il me paraît évident que malgré son hypothétique mise en place, les allocations familiales ne devront pas être, elles, supprimées. Celles-ci servent à maintenant la démographie dynamique, et les supprimer serait une « dinguerie » quand on voit les chiffres de la démographie espagnole, allemande, etc. Du coup, pour les libéraux, il faudrait que cette mesure soit accompagnée de la fin de ces aides, du SMIC pour se rapprocher encore plus près de leurs idées.
En outre, il est profondément liberalo-libertarien parce que fondé sur la confiance en l'homme, ce qui constitue tout de même le fondement de la théorie libérale. Le libéral fait confiance en l'homme. De fait, si le citoyen estime qu'avec 850€ il devra chômer, il chômera ; guidé par ses propres intérêts, l'État n'a pas à intervenir pour lui dire ce qui est bon pour lui. Sauf peut-être une hypothétique contrainte moral.
Ainsi donc, parce qu'il engendrerait une simplification des aides sociales, et parce qu'il se baserait sur le comportement rationnel de l'homme guidé par ses seuls intérêts, le revenu citoyen est souhaité par les plus libéraux. Qu'en est-il pour les socialistes ?

A l'heure où le chômage explose, et où les patrons ont tous les droits vis-à-vis des salariés, ce serait une aubaine pour les salariés. En fait, les gens ne seront plus obligés de se présenter sur le marché du travail : énorme révolution. L'homme n'est plus obligé d'aller sur le marché du travail, ce qui rejoint l'argument libéral selon lequel l'individu sera libre de chômer. Si l'homme n'est plus obligé de se présenter sur le marché du travail, de fait le rapport de force largement en faveur du patronat se retournera en faveur des salariés puisque ceux-ci ne seront plus contraints de travailler. Ceci étant acquis, on peut penser que cela pourrait ouvrir la voie à une augmentation de salaires puisque le chantage du licenciement cesserait de faire pression à la baisse sur les salaires. La catégorie des chômeurs disparaîtrait de fait.
De surcroît, comment ne pas souhaiter ce revenu quand on sait que les agriculteurs sont actuellement dans une situation délétère, que le salaire réel stagne voire baisse, et que cela pourrait soulager les apprentis qui travaillent dur pour un salaire peu élevé. En d'autres termes, cela pourrait être bénéfique à toutes ces classes « laborieuses » qui ont souvent du mal à joindre les deux bouts.

Dès lors, quels peuvent être les freins à son instauration ? Le recours à la théorie économique peut nous être utile. Elle postule que les agents arbitrent entre travail et loisir. Par exemple, si je vous donne 1500€ par mois à ne rien faire, il est clair que vous ne vous embêterez pas à aller travailler. Or, si on vous coupe les vivres et qu'on vous donne 200€ par mois pour survivre, là, vous serez obligé d'aller chercher un emploi. De ce point de vue, le Revenu citoyen peut constituer ce qu'on appelle une « trappe à inactivité. » De même qu'il peut créer un dualisme entre ceux qui décident de travailler, et ceux qui ne veulent pas. Certes, les SMICards et les petits revenus pourront en profiter largement, mais pour ceux qui sont au dessus du revenu médian, c'est-à-dire 1500€, il n'y aura rien. Or, la classe moyenne se situe juste un peu plus au dessus de ces 1500€, ce sera elle donc, qui devra une nouvelle fois fournir un effort financier supplémentaire sans en profiter.

En tout état de cause, le Revenu citoyen est sujet à de nombreux débats : délivrant l'homme de la contrainte du travail pour certains, favorisant l'assistanat pour d'autres. Facteur de dépenses sociales mirobolantes pour certains, possibilité de réduction pour d'autres. Démagogie pour certains, changement de société pour d'autres. C'est d'ailleurs sur ce sujet phare du programme présenté par Villepin que certains sont entrés en conflit avec lui comme Daniel Garrigue, pourtant proche de lui et estimant  que « cette mesure allait dans le sens de l'assistance, nous émettons des inquiétudes sur son coût : 30 milliards d'euros. » Bref, le Revenu citoyen n'a pas fini de faire parler de lui.




M. Dominique De Villepin, dans un discours proposant notamment l'instauration de ce Revenu citoyen.

vendredi 1 avril 2011

Fiction politique

En ce chaud matin d'avril, les secousses politiques n'en finissent plus de surprendre les observateurs, les politologues, les économistes et même les électeurs. En effet, de nombreux hommes politiques ont subitement changé leurs idéologies et ont enfin pris compte les réalités qui s'imposent au peuple. L'auteur présente ici un florilège de quelques personnalités.

Étrangement, Dominique Strauss-Kahn a enfin pris conscience qu'il n'y aura jamais de gouvernement mondial, souhait qu'il émet depuis des années déjà. En effet, il a compris - non sans mal - que les Nations étaient en fait le cadre le mieux approprié pour assurer la démocratie et la prospérité. Il a compris qu'il était utopique de rassembler des nations aux cultures différentes, aux religions différentes, aux histoires différentes, aux structures économiques différentes - ici, le cas de l'euro est criant de vérité - (...) dans un hypothétique gouvernement mondial sensé standardiser les Nations. En outre, il prendra en contre-pied Michel Rocard qui estime que « les souverainetés nationales entrent dans la période de nuisance », en expliquant justement que les Nations sont encore les seuls remparts face à la jungle libre-échangiste qui détricote les acquis sociaux, qui est responsable d'un chômage de masse dans les pays (ex?)industrialisés et peut conduire à de graves troubles sociaux.




M. Strauss-Kahn - mais on peut également citer Jacques Attali - renoncera-t-il un jour à son impossible gouvernement mondial ?


Jean-Claude Trichet a enfin compris que la France pâtissait d'un euro trop fort qui étouffait son économie. Il a écouté des économistes européistes comme Christian Saint-Étienne qui admettent que la France a effectivement « besoin d'un euro faible pour relancer son industrie morose ». Faisant fi des statuts de la BCE, il décide de monétiser massivement les dettes grecques et portugaises afin d'éloigner les spéculateurs d'une part, et de permettre à l'euro de baisser de l'autre. Ainsi, cela constituera une réelle bouffée d'oxygène au sein de la Zone euro qui  participera largement à la décrue du chômage de masse en France notamment.

Olivier Besancenot, pour sa part, a enfin compris que « la politique se faisait sur des réalités » pour reprendre les termes du Général de Gaulle, et non pas sur des bons sentiments tantôt humanistes, tantôt droit de l'hommistes. De fait, il a compris que l'immigration était un moyen pour les grands patrons de faire venir une main d'œuvre peu revendicative et plus docile afin de faire pression à la baisse sur les salaires locaux du fait de la concurrence que se livrent les travailleurs entre eux. Chacun peut voir les effets de la concurrence au sein de l'Union européenne même : le chantage à la délocalisation ouvre la voie à des salariés plus «compréhensifs » sur le plan des revendications salariales et du temps de travail. Le cas Siemens en Allemagne en fournit un merveilleux exemple.

François Hollande renonce à l'idée selon laquelle il serait normal, pour l'État, d'emprunter à la BCE pour financer les dépenses d'avenir. Il prendra parti contre l'article 123 qui interdit à la BCE de prêter directement aux États sans passer par la case banques privés qui n enrichissent qu'une petite poignée d'oligarques financiers sous couvert de rationalité économique.

Marine Le Pen a elle aussi compris quelque chose : surfer sur les passions populaires n'a jamais fait un programme politique. Ainsi, un parti ne peut pas se réclamer du libéralisme, voire du Libéral-conservatisme reaganien en période socialiste - héritage de Poujade et de sa révolte anti Fisc ; et d'autre part, 20 ans après, se réclamer du dirigisme par l'invocation systématique d'un « État fort ». Elle a compris, surtout, que dans une période de grave crise identitaire et économique, il fallait rassembler les français plutôt que de chercher des motifs pour les diviser.

Enfin, le gouvernement français actuel a compris, en écoutant Emmanuel Todd que «  les français étaient malheureux ». Ceci est une phrase vraie et reflétant bien la réalité : chômage de masse, exclusion en augmentation, et allocataires de minima sociaux toujours plus nombreux. On peut d'ailleurs faire un rapprochement avec le vote Front national. Prenant acte de la situation catastrophique du pays, il décide de prendre des mesures exceptionnelles : arrêt provisoire des régularisations de clandestins, redressement d'une école fondée sur le mérite personnel, ce qui passera par une politique de moyens et d'efficacité de sorte que l'investissement en R et D soit au moins doublée d'ici 2014. Prenant acte du manque de dynamisme des PME le gouvernement prend la décision de baisser les charges qui pèsent sur les vrais créateurs d'emplois. Enfin, il décide d'allouer plus de moyens à la police et à la justice afin de préserver la sécurité des français, qui reste le premier « bien public » du peuple.

Malheureusement, cette politique fiction ne durera que le temps, d'un premier avril.

vendredi 11 février 2011

L'Ecole est-elle de gauche ?

Ce débat mérite d'être posé. Traiter la problématique de l'École dans son ensemble prendrait des heures, tant les problèmes qui la touche sont nombreux. C'est pourquoi je ne toucherai ici qu'un domaine, qui fait l'objet de nombreux débats et qui agite de nombreuses passions. D'un côté, nous avons les libéraux, qui estiment que l'École en général, et la fonction publique en particulier, est infestée de gens de l'ultra-gauche. Dès lors, il est clair, selon eux, que la pensée unique gauchiste apparente au sein de l'Éducation nationale tend à baisser le niveau des élèves, au nom de l'égalité. De l'autre côté, les gens de gauche qui estiment, selon la théorie bourdieusienne que l'école est aujourd'hui un lieu qui favorise d'inégalité, puisqu'elle permet aux bourgeois de se reproduire socialement.

A première vue, l'École est aujourd'hui, clairement de gauche. Il suffit de se balader dans les couloirs des Universités pour apercevoir de nombreux journaux et tracts des forces syndicales telle Force ouvrière, et même des petits prospectus vantant les mérites de la HALDE. L'idéologie dominante des Universités est de gauche. Les fonctionnaires en général, et les professeurs en particulier constituent clairement la clientèle principale du Parti socialiste par exemple, qui a perdu l'électorat ouvrier/employé depuis bien longtemps. Si bien que lorsque le gouvernement tente de supprimer des postes de professeurs, le Parti socialiste crie au scandale, tout en sachant pertinemment que le nombre de professeurs à largement augmenté - les moyens avec - alors que le nombre d'élèves baissait. L'Éducation n'est pas qu'une simple affaire d'argent, il convient également de prendre en compte le facteur d'efficacité et de cadre : pourquoi les filières professionnelles sont si mal vues ? Le collège unique est t-il efficace ? Bref, il faut d'abord redéfinir le cadre dans lequel les jeunes élèves étudient, et non pas déverser des milliards dans un système qui, me paraît être à bout de souffle.

Toutefois, si l'idéologie - dominante - des professeurs est clairement de gauche, ce n'est pour autant que les les programmes le sont pour autant. C'est la critique fondamentale que l'on peut adresser aux libéraux qui pensent que la France enseigne l'économie de manière très "gauchiste". Dernièrement, Olivier Vial, président de l'UNI protestait contre cela, en disant qu'on donnait, entre autre, une mauvaise vision de l'entreprise dans le programme. Or c'est pourtant l'inverse que l'on peut constater. Car les programmes ne sont pas du tout élaborés sous le prisme gauchiste. Ainsi, en classe de 1ère ES, le tiers du programme est consacré à l'étude du marché, à l'enseignement de la théorie de la concurrence pure et parfaite. En terminale ES, une large partie de l'année est consacrée à la mondialisation et au commerce international, à la notion de PIB, ainsi qu'au volet économique de la construction européenne. De surcroît, l'entrée en faculté d'économie s'accompagne directement d'un enseignement de la micro-économie libérale : théorie du consommateur et du producteur, notion d'homo œconomicus et de l'homme rationnel. En d'autres termes, ce sont les fondements de l'économie libérale qui sont, d'emblée, enseignés dans le supérieur. En outre, la théorie keynésienne commençait à être de moins en moins évoquée avant la crise. D'autres - moins chanceux, comme Marx notamment, sont  bannis de l'enseignement supérieur (!). Bref, sans même être exhaustif, l'on comprend bien que l'enseignement au lycée, comme à l'Université n'est nullement  présentée sous le prisme gauchiste. Par ailleurs, il est absurde de dire que le système scolaire formate les enfants de sorte qu'ils deviennent des "amoureux" de l'État. Les enfants n'écoutent pas systématiquement ce que les professeurs disent, ceux-ci votent bien souvent en fonction du vote familial. La catégorie socio-professionnelle des parents influe bien plus sur la pensée politique - quand il y en a une, bien entendu - de l'enfant que la pensée de soi-disant idéologues gauchistes. Ce faisant, les thèses de M. Vial témoignent d'une profonde mauvaise foi et largement teintées d'idéologie.  Or, il existe pourtant un réel reproche que l'on peut faire aux pédago bourdieusiens, sans pour autant sombrer dans le dogmatisme.




L'Ecole de la IIIème République.

En effet, il convient maintenant d'aborder la question de la baisse  du niveau. Celui-ci résulte de deux facteurs ; d'une part une obtention massive du baccalauréat (87%!), et d'autre part, l'absence de concours à l'entrée des Universités. Ces deux facteurs conjugués à la pression de syndicats comme l'UNEF tendent à baisser irréversiblement le niveau. D'abord parce que le baccalauréat n'a plus vraiment de valeur intrinsèque, mais aussi parce que tout le monde peut intégrer l'Université ; pour des résultats que l'on sait médiocres pour la plupart. Ceci occasionne surcharge du nombre d'élèves dans les groupes de TD, handicapant par la même les élèves "moyens", et gâchis d'argent pour l'État. Revenons sur un exemple flagrant qui convient d'être énoncé : dès lors qu'une Université tente, un tant soit peu, d'élever le niveau, en supprimant les rattrapages lors de la 1ère année par exemple, les UNEFiens crient au scandale. Comme si rétablir un minimum de méritocratie se faisait au détriment de l'égalité des chances. Mais malheureusement, la vraie inégalité des chances réside en ce que chacun souhaite faire de son temps. Il y a, en effet, la possibilité pour tous de réussir dans une Université publique et (quasi) gratuite dès lors que l'on souhaite apprendre et comprendre. Il y a ceux qui travaillent et qui consacrent du temps à leurs études, et d'autres qui ne veulent pas travailler. A cet égard, on doit comprendre que l'Université n'est pas un lieu ou tout doit être fait pour que l'on décerne des diplômes à tout le monde, cela doit rester un lieu ou l'on mérite ses diplômes. On ne peut pas éternellement continuer de brader des diplômes d'État pour rétablir une prétendue égalité des chances, car fondamentalement, on ne fait que faire fuir les plus intelligents vers les grandes écoles écoles, ou même des écoles de commerce. Ceci explique  - partiellement, il est vrai -  pourquoi la France possède bien moins de titulaires du Doctorat que l'Allemagne. Il serait peut-être temps de se rendre compte que c'est parce que l'Université n'attire plus.

Pendant que la gauche pédago et la droite libérale se déchirent, une grande gagnante semble se frayer un chemin dans l'enseignement. Ainsi assistons-nous, depuis plusieurs années, à l'arrivée de l'Union européenne dans les programmes scolaires et extra-scolaire. Option dite "européenne" au collège et poursuivie au lycée (classes dans lesquelles on distribue, entre autre, des posters retraçant la grandiose épopée européenne), enseignement massif de l'Europe sous toutes ses formes dans les Universités ainsi que dans les IEP. Le principe est parfaitement simple : faire voyager pendant une ou deux semaines ceux qui ont choisi ladite option dans le cadre du cours. De fait, n'importe quel jeune étudiant associera les joies de voyager au mythe de la grande et belle Europe. On ne dira cependant jamais qu'auparavant, il suffisait simplement de se munir d'un passeport et d'un visa pour y aller. Mais, ça ne s'arrête pas là ! Une Université comme celle de Rennes est directement subventionnée par la Commission de Bruxelles pour que celle-ci enseigne l'Europe. Comme cela se traduit t-il ? Par de l'Europe sous toutes ses formes : sociologie, droit, économie. Un bourrage de crâne méthodique, qui prend parfois la forme de propagande (posters distribués etc.) qui a désormais toute sa place dans l'enseignement scolaire sans que personne ne dise quoique ce soit. Repentance, enseignement massif de l'Europe peuvent être mis au crédit de la gauche pédago, qui associe à tort nation à guerre, et Europe à paix.

Ainsi donc, nous l'avons vu, si le fond idéologique de l'École est clairement de gauche, il n'en découle pas forcément des programmes de gauche. Le réel problème se situe dans la baisse du niveau, et pose la question fondamentale : voulons nous une École d'excellence pour demain, ou une École au rabais, qui décerne des diplômes à tout va ?

jeudi 18 novembre 2010

Qu'est ce qu'être gaulliste aujourd'hui ?


Réponse aux questions de Richard Patrosso, journaliste à agoravox.


Vous êtes jeune et né après la mort du Général de Gaulle. Et pourtant, vous vous revendiquez du 
Gaullisme. Comment donc êtes-vous devenu gaulliste ?

Il y a bien des Jeunes socialistes non ? Idéologie bien plus ancienne que la gaullisme... Par conséquent, on peut se réclamer de l'action d'un homme, qui date de seulement 60 ans.
Le gaullisme m'a touché en ce qu'il présente déjà un programme politique, social pour la France. La lecture des Tomes d'Alain Peyrefitte "C'était de Gaulle" ont été une révélation pour moi, tant on se rend le général était lucide, et clairvoyant. Bien sûr, il y a les faits qui démontrent constamment la lucidité des idées gaullistes d'aujourd'hui : crise de l'euro, problème des frontières avec l'affaire des Roms, le partage des profits de plus en plus en faveur du capital qui est totalement contraire à notre idéal de partage capital-travail (...). Dit autrement, tous ces faits ne peuvent que conforter dans cette certaine idée de la France...


Qu'est-ce qu'être gaulliste aujourd'hui ?

J’ai pour coutume de dire que la politique du Général doit servir de boussole. Autrement dit, le gaullisme doit guider la France. Nous devons nous inspirer -j’insiste sur ce terme par opposition au terme reproduire- de la politique du Général axée sur un État interventionniste, qui reprend ses droits régaliens, notamment la création monétaire, qui lui a été volé par les banquiers privés. Ces deux points fondamentaux doivent nous amener à remettre en question l’Union européenne d’aujourd’hui. Car l’Europe à 27 est un bourbier dans lequel la France s’enfonce lentement mais sûrement. La BCE, qui mène une politique purement au profit des rentiers, est totalement à l’opposée des besoins de la France. La manifestation la plus cruelle de cette politique est le chômage de masse qui mine actuellement notre pays. Au vu de son dynamisme démographique, il est nécessaire et urgent que notre Banque centrale nationale - débarrassée des dogmes ultra-libéraux - puisse créer la monnaie elle-même, impliquant par là-même un retour à un franc dévalué qui conduira à une relance de nos exportations, à une hausse des profits et donc, in fine, de l’emploi. De même, la France doit retrouver la maitrise de ses frontières sur le plan commercial d’une part, sur le plan de l’immigration de l’autre. Car on ne peut pas laisser le libre échangisme total appauvrir à ce point notre nation. Emmanuel Todd et même Maurice Allais l’ont démontré. Sur le plan de l’immigration, la France doit retrouver une politique plus rigoureuse, ce qui implique notamment une remise en cause du droit du sol et un durcissement d’accès à la nationalité française.



Le Général de Gaulle a été considéré comme le sauveur de la France parce qu'il a permis de vaincre l'Occupant, ce nazi qui gazait des gens dans des camps. Aujourd'hui, les camps ont disparu, mais des gens sont expulsés dans des Pays qu'ils avaient quitté pour échapper à la mort. La France, patrie des Droits de l'Homme qui, dans ses lois, par deux fois (1981 et 2007), a aboli la peine de mort, est un État qui renvoie des gens se faire tuer. Est-ce un échec dans la victoire sur le III° Reich ? Avez-vous le sentiment d'être en 1940, sur ce plan-là ?


Cette comparaison est fallacieuse. La France qui expulse les Roms n’est nullement nazie ou hitlérienne. Rocard lui-même disait "on ne peut pas accueillir toute la misère du monde. L’Angleterre, qui a la maîtrise de ses frontières, renvoie aux frontières les étrangers non-désirés. La France se voit ainsi contrainte d’accueillir les immigrés que les Anglais refusent. La "jungle" de Calais, c’est ça : des gens qui souhaitent passer la frontière anglaise ! On ne peut pas continuellement peupler la France d’étrangers. Certains quartiers à Paris sont déjà totalement étrangers : Gare de l’Est, la Chapelle, Barbès (...) et certaines belles âmes nous expliquent que la diversité est nécessairement bonne. Mais non, car dès lors que ces populations sont plus nombreuses que les autochtones, ce sont leurs coutumes qui priment : nourriture halal, femmes voilées, prières dans les rues. La France est un pays ouvert, qui, à mon sens, doit accueillir des Arabes, des Noirs, des Jaunes. Cependant, on ne peut pas faire venir des populations étrangères sans leur donner un boulot, sinon la France devient un bouc-émissaire parfait. De fait, les jeunes algériens qui vivent en France la haïssent, d’une part parce qu’il y a toujours le problème de la colonisation et d’autre part parce que celle-ci n’a plus rien à leur offrir.
La politique du Général de Gaulle était claire : strict contrôle de l’immigration. Or, fut-il pour autant un dictateur Nazi ? Je ne le crois pas. Celui-ci disait à Peyrefitte :" Vous croyez que le corps français peut absorber dix millions de musulmans, qui demain seront 20 puis 40 ?".


"De Gaulle a donné à la France un éclat qu'elle n'avait pas connu depuis Louis XIV et Napoléon. Ce n'est quand même pas si mal.[...] De Gaulle l'a prise par deux fois, alors qu'elle était au fond de l'abîme ou qu'elle y roulait, et l'a remise sur pied par la seule force de sa volonté."
Malraux /C'était de Gaulle/.




Vous êtes un militant de Debout la République et non de l'UMP. Ce dernier parti n'a rien de gaulliste ? Vraiment ? Quand ses adhérents se réclament du Général de Gaulle, ce sont des menteurs ? Quelle est votre différence avec l'UMP ?

L'UMP a cette contradiction fondamentale : elle se réclame du gaullisme tout en trahissant constamment ses mythes fondateurs. Ainsi, je vais donner un exemple récent. On entendait François Fillon expliquer doctement que les détracteurs de l'euro s'étaient tromper sur toute la ligne et que l'euro restait solide (...). Bref, un discours d'européiste convaincu. Or, de qui se réclame François Fillon ? De de Gaulle. Qui était son mentor ? Philippe Séguin, un des plus fervents opposants à Maastricht et à la monnaie unique. On se rappelle tous d'ailleurs, de ce discours historique de 1992. Nicolas Sarkozy, lui, voue un culte aux États-Unis et ne s'en n'est jamais caché. Par exemple, il nous a réintégré dans le commandement intégré de l'OTAN.

Pourquoi avez-vous choisi Debout la République ?

C'est un parti libre, indépendant, et, à mon sens, le plus à même de représenter les souverainistes. On parle beaucoup du FN en tant que parti d'opposition. Or, le FN joue un rôle nauséabond dans la démocratie dans la mesure ou il incarne le vote de la colère et des "anti-tout". A DLR, nous avons une réelle réflexion sur l'Europe, l'éducation, la nation, la sécurité. Autrement dit, nous avons un réel projet de société à présenter au Peuple français. DLR présente ainsi  un programme comprenant 101 propositions. Ce faisant, et de manière plus globale, nous proposons aux Français de reprendre le pouvoir qu'ils ont perdu de manière patente en 2005 lorsque Nicolas Sarkozy a fait passer le Traité de Lisbonne au Parlement malgré le NON qui l'emportait alors à 55%.

mardi 19 octobre 2010

Décryptage d'un tract de l'UNEF

Ce matin, en me dirigeant vers la Fac, j'ai été cueilli par des militants de l'UNEF qui m'ont alors donné un prospectus dans lequel ils y dénoncent la réforme des retraites. Je me réserve ici donc un droit de réponse à ce qui y est proposé et, à l'appui du tract, démontrer à quel point les dénonciations qui y sont faites sont remplies d'approximations et inexactitudes, et place les étudiants dans un position victimaire.
Pourquoi s'attaquer à l'UNEF et non aux syndicats "classiques"? Je m'attaque à l'UNEF car en tant qu'étudiant, je préfère me concerter sur mon domaine précis. Autrement dit le domaine universitaire et non le domaine du travail (CGT...) qui ne me concerne pas (encore). 

Dans la quasi totalité du tract diffusé, l'UNEF ment. Elle ment en faisant croire que c'est un adieu à la retraite par répartition : " nous défendons une société qui donne à chacun la possibilité de bénéficier de la solidarité intergénérationnelle". Ah ? Et est-ce le projet gouvernemental qui remettrait en cause ce principe ? A ma connaissance non. En fait, nous avons là une pure mystification. L'UNEF serait le garant de la retraite par répartition quand le gouvernement en serait le destructeur. Or justement, en reculant l'âge légal de départ à la retraite, on permet au système de répartition de se rééquilibrer un tant soit peu. Nous savons bien évidemment que cette réforme est insuffisante et optimiste parce qu'elle table sur une croissance forte. Mais en instaurant le départ légal à la retraite à 65 voire 67 ans, le gouvernement se suiciderait politiquement. La réforme de l'âge légal est donc juste quoiqu'incomplet. Comme je l'ai dit dans un précédent billet, le réel problème c'est le recul de l'âge maximum de 65 à 67 ans. Or, ledit problème n'apparait guère dans le tract de l'UNEF. Ils nous expliquent également que cette réforme va "contre leurs droits". J'aimerais bien savoir de quels droits parlent t-ils... Mais manifestement, c'est plutôt le droit de milliers d'étudiants voulant étudier qui est violé.

Mais le plus frappant dans ces tracts UNEFiens, ce n'est pas tant l'aspect totalement utopique des réformes proposées - bien qu'elles soient quasi inexistantes -, mais surtout l'aspect victimaire. Ces tracts sont constamment en train de pleurer sur la condition étudiante. Comme si étudier en France se faisait dans des conditions inhumaines.  Pour cela, je vais prendre ma situation personnelle. Ça tombe bien, je suis moi-même boursier. D'une part, les droits d'inscription à l'Université sont nuls lorsqu'on est boursier, d'autre part, les plus pauvres bénéficient à la fois de bourse et d'APL si besoin. L'État fait donc tout pour assurer à l'étudiant une vie décente. Le gouvernement - pour une fois bien inspiré - a même augmenté les bourses de 6%. Mais l'UNEF pleure en nous expliquant que "les jeunes sont devenus une sous-catégorie de citoyen". Pourtant, la condition étudiante est loin d'être laborieuse. De fait, il suffit de regarder ailleurs : les écoles en Angleterre et aux États-Unis sont presque toutes payantes, privées et très chères. En France, en plus d'avoir un système gratuit et public, les étudiants sont subventionnés ! Et c'est tant mieux d'ailleurs. Mais qu'on ne vienne pas dire en retour qu'en France, les jeunes sont des sous-citoyens non considérés. Ces phrases toutes faites ne servent qu'à attiser la haine de certains étudiants, qui finiront dans la rue pour montrer qu'ils existent.

En outre, nous pouvons voir également ceci " nous aspirons à bénéficier des mêmes droits que nos ainés : une retraite solidaire à 60 ans !". J'ai au début crû que c'était une blague. Mais non c'est très sérieux. Car comment peut-on croire qu'en 2060, l'âge ou notre génération ira en retraite - approximativement -, les paramètres n'auront pas changé ? De même, je ne vois pas en quoi la retraite à 60 ans serait solidaire, et celle à 62 ans ne le serait pas... Dès lors, comment faire confiance à un syndicat qui nous explique que dans 50 ans, la retraite à 60 ans devra continuer d'exister ? 
Les mêmes droits sociaux que nos aînés... Le problème, c'est que nos "ainés" ont été la génération archi privilégiée. Et la gauche au pouvoir a accentué les privilèges. Ainsi pendant les 30 glorieuses, l'inflation oscillait entre 10 et 15%, ce qui permettait d'accéder plus facilement à la propriété. Parfois, les taux d'intérêts étaient même négatifs : on remboursait au banquier moins en valeur réelle que ce qu'on lui avait emprunté auparavant. De même, l'accès sur le marché du travail était aisé, tant la pénurie d'emploi était manifeste à l'époque. Sous Mitterand, on a décrété la retraite à 60 ans mais même Jacques Delors à l'époque était opposé. Cette décision était juste dans la mesure ou ceux qui étaient nés en 1920 avaient connu presque 2 guerres, la retraite à 60 ans ( en 1980 donc) était plus que normal. Mais aujourd'hui, avec la mise en concurrence des modèles sociaux, les marges de manœuvre sont très étroites. Or, qui a signé l'acte unique européen ? La gauche. Qui a préparé Maastricht ? La gauche. Qui a concédé à l'Allemagne le fait d'avoir une gestion rigoureuse de la monnaie et le statut d'une banque centrale indépendante dont le seul rôle est de lutter contre l'inflation ? Encore la gauche ! La gauche, à laquelle l'UNEF appartient idéologiquement, la plupart étant au MJS, et assimilés. Dans l'Europe, c'est toujours le moins disant social qui gagne. Ryanair veut le droit social irlandais en France, il ne l'a pas ? Très bien aurevoir. la France, et tant pi pour les 1000 emplois sacrifiés. Voilà l'Europe d'aujourd'hui, c'est la mise en concurrence permanentes des modèles sociaux. N'était-ce pas Barroso qui disait qu'il restait aux PECO "l'arme fiscale" pour attirer les entreprises ? Je veux dire aux UNEFiens que vous manifestez contre des réformes structurelles que le système nous oblige à faire. Vous chérissez des causes utopiques "les années d'études doivent être prises en compte dans le calcul d'annuité", vous chérissez des causes de gauche, mais le système en lui même, vous ne le remettez pas en question. Pourquoi ne dîtes vous pas que la Commission européenne ordonne à la France de déplacer l'âge légal ? C'est marqué noir sur blanc pourtant !  S'en prendre à Nicolas Sarkozy c'est plus facile et ça mobilise plus je vous l'accorde, mais de fait, vous restez dans la pensée unique simpliste : "non au projet de réforme ! Par contre faire quoi je ne sais pas, bon peut-être commencer par prendre en compte les études comme années de cotisation mais..." Bref, contestation stérile.
L'UNEF ment également avec cette argument désormais célèbre mais parfaitement inexacte : "Sarkozy veut faire travailler vieux plus longtemps c'est un million d'emplois qui ne seront pas libérés d'ici 2016". Malheureusement, les les mises en pré-retraites de milliers de travailleurs n'ont pas permis d'améliorer la santé du marché du travail. L'économie n'obéit pas systématiquement à la règle : un poste libéré = un nouveau poste. Sous l'ère Jospin, les entreprises s'en sont surtout servi pour augmenter leur profit en réduisant leur masse salariale...

Ainsi donc, l'UNEF à travers un tract, nous a offert une belle leçon de démagogie, de misérabilisme, et d'inexactitude. Le problème, c'est que la plupart des lycéens et étudiants croient à ce tissu d'âneries évoqué plus haut. Et n'importe quel étudiant est aujourd'hui menacé de ne pas pouvoir étudier parce qu'une poignée de jeunes révoltés font croire que la condition étudiante est terrible.


Tract de l'UNEF.

dimanche 26 septembre 2010

Rentrée agitée

Nicolas Sarkozy a surement passé les pires vacances de sa vie. Malgré la luxueuse demeure "Cap-négrienne" de Carla, la quasi guerre civile, l'affaire Bettencourt, et aussi les retraites ont miné les vacances présidentielles. Pour couronner le tout, la grève du 7 septembre remet une nouvelle fois le pays dans un état de paralysie. Cela dit, loin de la vision bien-pensante - notamment socialiste - que les médias véhiculent, la plupart de ces affaires recèlent de non-dit. Certes, ces vacances ont affaibli le pouvoir actuel, de par les évènements qui se sont succédés et que j'ai succinctement évoqué plus haut. Néanmoins, et encore une fois, cela ne profite absolument pas au Parti socialiste, faute d'idées crédibles à présenter.. Le bipartisme qui s'est installé dans la démocratie française ( mais pas que ) a largement rendu le débat public très simpliste : si l'UMP dit blanc, le PS dit noir. Et c'est comme ça depuis des années. Ainsi, alors que l'Union nationale aurait dû être décrétée lors de la quasi guerre civile à Grenoble, les socialistes n'ont pas trouvé mieux que critiquer la politique dite du "tout-répressif" qui est tout à fait fausse. Nous y reviendrons bien évidemment. De même, bien qu'un billet ait déjà été rédigé à propos des retraites, il convient d'y revenir brièvement, notamment à cause du lien qui l'unit avec la manifestation récente du 7 septembre.

D'abord les évènements grenoblois. Ce qui s'y est passé est extrêmement inquiétant, à plus forte raison lorsque le ministre qui est sensé s'en charger se révèle incompétent. Car oui, Nicolas Sarkozy est président, mais il ne peut pas tout faire. Et, comme beaucoup il s'entoure de ses amis au gouvernement. Ça donne des Christian Estrosi, et des Brice Hortefeux, des nuls donc, pour parler très crûment - contrairement à Woerth dont nous évoquerons le cas plus loin. A force de vouloir s'entourer d'amis, Sarkozy a oublié de s'entourer de gens compétents en privilégiant la simplicité   plutôt que des gens comme Xavier Darcos ( grand léttré ) par exemple. Les échecs cinglants ne manquent pas : Dati, Joyandet etc qui décridibilisent fortement le gouvernement. Mais revenons au conflit grenoblois. Ceux-ci sont très alarmants dans la mesure ou les évènements sont de plus en plus violents et témoignent d'un profond "sans-gênisme" de ces barbares, et ce, pour plusieurs raisons. D'abord, la police ne fait plus peur. De fait, le nombre de policier baisse de plus en plus afin de permettre au gouvernement de faire quelques économies misérables - 50 millions -, quand, dans le même temps, on accorde 17 milliards (!) d'aide à la Grèce. Dès lors, la désertion progressive des forces de police tend indiscutablement à son inefficacité, étant incapable de répondre à la demande de sécurité des français. Or justement, les français n'ont jamais autant ressenti le besoin de sécurité. La justice, quant à elle, ne fait plus peur non plus. Elle ne fait plus peur parce qu'elle ne sanctionne plus. En effet, depuis des années, la prison est vue comme un mal qu'il faut éviter au maximum, et que personne ne mérite de purger de longues peines. Alors on libère des criminels après seulement la moitié du temps de peine requis, on supprime la double peine qui permettait à l'État de renvoyer les étrangers qui semait le trouble sur le territoire, on a également supprimé la peine de mort sans la remplacer par aucune mesure dissuasive. Bref, nous avons à faire à une justice de plus en plus laxiste, des prisons de plus en plus chargées, des policiers de moins en moins nombreux, mais une insécurité qui est de plus en plus manifeste.

Venons en maintenant à l'affaire Bettencourt. Cette affaire met en lumière les différentes magouilles qui se passent au sommet du pouvoir. Pour autant, je soutiens Eric Woerth parce qu'il est un homme compétent. Le problème d'aujourd'hui, c'est qu'on s'étonne encore qu'il y ait des affaires. Or, les affaires et les magouilles ne sont pas l'apanage de Nicolas Sarkozy lui-même. Seul De Gaulle peut se vanter de n'avoir jamais pris dans les caisses de l'État. De fait, entre l'emprunt de Giscard qui ont ruiné les finances publiques au profit des rentiers, les "affaires" sous la sacro-sainte gôche humaniste mitterandiste, les emplois fictifs sous Chirac. (...). De même que nous savons tous que les milieux financiers ont de réels pouvoirs sur les politiques. La promiscuité est tout à fait choquante mais pas nouvelle. Par exemple, il y a 20 ans, M. Mitterand ne s'était pas interdit de faire rentrer Bernard Tapie au gouvernement en tant que Ministre de la ville, le copinage n'est donc pas spécifique à Sarkozy, mais à la quasi totalité des présidents que nous avons eu.



M. Bernard Tapie

Aussi, Eric Woerth s'applique simplement à proposer une réforme qui n'est pas la sienne mais celle de Raymond Soubie. Ce n'est pas son projet à lui à proprement parler. De même que cette idée de décalage de l'âge de la retraite n'est pas nouveau. Des économistes influents comme Christian Saint-Étienne, Jacques Attali proposent le report depuis pas mal d'années déjà : ce n'est donc pas une réforme tombée du ciel. Toutefois, Sarkozy avait juré ne pas avoir voté pour reculer l'âge de la retraite. Alors, qu'est ce qui peut l'avoir fait changé d'avis ? Très simple, c'est la pression mise par la Commission européenne sur la France pour que cette dernière recule l'âge légal de la retraite. Celle-ci, depuis des années se bat pour que la France quitte les 60 ans et un ami blogueur le rapporte très bien : [ La France se doit ] "d’entreprendre sans tarder une réforme complète de son système de retraite, afin d’en assurer la viabilité financière et d’élever l'âge effectif de la retraite", nous dit un rapport un rapport rendu à la Commission européenne. Par ailleurs, même sans cotisation au préalable, il était possible de partir à la retraite à 65 ans. Or, l'une des réformes les plus dégueulasses sous l'air Sarkozy consiste à faire passer cet âge à 67 ans. On pourrait nous rétorquer que de nombreux profiteurs bénéficient de ce système. Mais non, d'après une étude, le montant des retraites prises à 65 ans avoisine les... 400€ ! Le PS dans cette histoire est aux abonnés absent. Préférant faire de la récup' et s'associer aux syndicats pour la retraite à 60 ans. Évidemment, l'idée selon laquelle si ils sont élus en 2012 on remettra la retraite à 60 ans n'est que pure mystification. Ce n'est qu'un grand rideau de fumée qui cache le manque d'idée du PS, incapable de trouver des solutions autrement que par des taxes et des impôts.
Aussi y a t-il une volonté politique de Sarkozy de montrer au monde entier et, a fortiori, aux marchés que la France est réformable. Expliquons-nous. Il a entreprit une réforme des retraites sensée ramener le régime à l'équilibre. Bien. Si, à cause des grèves, Sarkozy fait marche arrière, ce serait un message très net aux marchés : la France est irréformable. Les investisseurs douteraient et les agences de notations nous dégraderaient. Les banques n'attendent que ça : pomper toujours plus le contribuable et la collectivité par le biais de taux d'intérêts élevés. 

C'est ce qui se passe en Grèce : 10% pompé sur le peuple grec. Là aussi, les politiques préconisées par le FMI et la Commission sont largement responsables de ce désastre. La Grèce est en dépression, et les émeutes continuent à Athènes. Or, la Grèce aurait pu dévaluer sa monnaie et ainsi atténuer le poids de la rigueur qui s'abat sur elle De toute façon, on a beau nous expliquer que ça aurait été pire, avec le drachme, rien n'est pire qu'une rébellion sociale due à une dépression comme c'est le cas actuellement. Pourquoi s'ingénier à garder l'euro en Grèce ? Parce que le fétichisme de la monnaie forte est largement rependu dans les couloirs de Bruxelles et du FMI. Une monnaie doit être forte, car elle permet aux détenteurs de capitaux d'avoir plus d'argent dans un panier de devises étranger. Admettons qu'un euro = un dollar. Si l'euro par la suite s'apprécie et monte à 1.5$. Cela veut dire qu'au lieu de n'avoir que que 2$ avec 2€ nous avons 3$ !  Plus l'euro s'apprécie face au dollar, plus les rentiers voient leurs pouvoir d'achat en zone dollar augmenter. Mais moins les petits exportateurs peuvent vendre leurs produits à l'étranger, puisque le taux de change leur est alors défavorable,  rendant l'export bien plus couteux, et par la même, conduisant à une baisse de compétitivité des entreprises. Lors de la crise russe faisant suite à la chute de l'URSS, le FMI a longtemps interdit à la Russie de dévaluer le rouble pour stabiliser la monnaie, persuadés que stabilité monétaire = stabilité politique - Trichet en est lui aussi convaincu. Bien que l'économie russe ait été complètement asphyxiée et le pays au bord du chaos, le FMI n'en démordait pas. Après des années de dépression, le gouvernement dévalua le rouble, et pu enfin retrouver le chemin de la croissance. Bref, la monnaie forte favorise les détenteurs de capitaux, le rôle du FMI et de la Commission est de faire bouffer des années de récession au peuple grec pour protéger la monnaie et par la même, les rentiers. L'UE peut se targuer de respecter les droits de l'homme et toutes autres niaiseries de ce genre. Foutaises : elle n'a que faire du peuple. Oui les grecs ont triché, mais les espagnols, et  les irlandais ? Pourtant, ces deux derniers avaient de faibles taux d'impôts sur le revenu et les sociétés ? Le paradis pour nos amis bruxellois ! Qu'ont-ils à dire pour leur défense ? Rien. C'est dommage, car ce n'est pas le cas grec, on ne peut pas mettre leur crise sur l'autel de la triche. Non là ils sont simplement victimes d'une monnaie adaptée pour personne, et sur laquelle on voue des populations entières au chômage de masse, et à la régression sociale. Cela dit, les délires bruxellois continuent de plus bel. Derrière ces gesticulations permanentes du président, et de cet afflux d'information, on en oublierait presque que l'UE va désormais examiner avant les Parlements démocratiquement élus les budgets nationaux. Seul le site Boursorama en a parlé, ou presque.  Autrement dit,  dans la discrétion la plus totale, la France vient une nouvelle fois de se soumettre aux exigences de la Commission. C'est d'autant plus fâcheux que nous allons donner ce pouvoir à des gens non-élus et qui ont déjà gravement fauté lors de la rédaction du traité de Maastricht en ne se préoccupant que de la dette publique. Or, si l'Espagne (par exemple) est dans un profond marasme c'est précisément à cause de la dette privée ! Ce sont donc à ces mêmes illuminés ultra-libéraux que nous allons donner ce pouvoir. Dorénavant, pour voter un budget, il faudra que la clique Barroso/Von Rompuy ( qui ne représente absolument personne ) donne son feu vert...


En Grèce, le FMI et la Commission qui imposent l'euro fort sont en train de mener le pays à une régression sociale sans précédent. L'Irlande et l'Espagne sont eux aussi dans une état critique (plus de 20% de chômage en Espagne !).


Lors de cet été, nous avons également pu mettre au premier plan l'échec de l'Europe de Schengen qui institue la suppression des frontières entre les États membres. Évidemment, les bien pensants voient dans cette suppression une formidable aubaine pour l'Europe fédéraliste, à l'instar de Denis Olivennes qui croit encore que frontières est forcément associé à barbelés et militaires. La France offre - et c'est tant mieux - des aides généreuses aux plus démunis. Elle est donc une terre privilégiée pour les immigrés. Or aujourd'hui, notre modèle social est en quasi faillite. Mais nous continuons à importer la misère venue de l'étranger, alors qu'il subsiste déjà 40% de chômage dans certaines banlieues ! Dit autrement, nous importons des chômeurs, nous importons la misère. Au lieu de tout faire pour trouver du boulot à nos jeunes de banlieues, on préfère surcharger les banlieues et continuer à ouvrir les frontières à l'Europe pauvre. Oh bien évidemment, les belles âmes ont été choqué par cette politique pseudo-vichyste. Les États-Unis par exemple. Rappelons toutefois que, les États-Unis ont un mur de 1000km qui les sépare du Mexique. De ce point de vue, inutile de jouer les grands défenseurs des droits de l'homme, sans parler de Guantanamo. Que chacun balaye devant sa porte avant de donner des leçons de morale. Les roms étaient en situation irrégulière sur le territoire français, il n'y a donc aucune raison de les garder, ceux-ci étant plus que susceptible de commettre vol, agression (etc...). On peut d'ailleurs se demander si ce n'est pas plutôt le président roumain qui devrait être accusé, car c'est trop facile de laisser une partie de sa population (non-désirée) s'enfuir. Ceci permet de ne pas voir les réels problèmes d'intégration de cette population en Roumanie. Et ce, malgré les milliards donnés par l'UE. 

En tout état de cause, ce qui s'est passé en France, ce n'est qu'un simple respect des lois républicaines. En revanche, ce qui est dommageable, c'est qu'une nouvelle fois, le gouvernement ait fait son beurre sur les expulsions, manœuvre politicienne ayant pour but de nous faire croire qu'aujourd'hui, il peut encore agir et qu'il est encore capable d'exercer sa souveraineté.


mercredi 28 juillet 2010

Contribution à la critique de Frédéric Martel

On ne se lasse plus de ces donneurs de  leçons. Dans un papier, Frédéric Martel - qui je reconnais, m'était alors inconnu -  expose sa thèse selon laquelle les français devraient se mettre au plus vite à l'anglais. L'anglais moderne, le français has been. Telle semblerait  être la thèse de ce sinistre personnage dont le torchon a été publié par Le Point dans le "rayon" Culture (!)
Je n'ai jamais commenté les articles des autres blogueurs ou journalistes. Je n'en ai pas la prétention, et ce n'est pas l'objectif  premier de ce blog. Toutefois, cet article de Martel foisonne de lieux communs, de contradictions, de paradoxes, mais surtout symbolise la pensée unique mondialiste qui souhaiterait adapter la vieille France à la mondialisation néolibérale anglo-saxone. Le marché est actuellement régie par les règles néolibérales tout droit venues des États-Unis. Ainsi les français devraient t-ils s'adapter à la langue anglaise, langue du marché, langue moderne.
Pour ceux qui n'auraient pas lu ce chef d-œuvre de leurs propres yeux je le joins ici. Pour les autres, je vais reprendre une liste non exhaustive de ses meilleurs passages, tout en les commentant plus bas.

Sans avoir peur du ridicule, Jean-Pierre Raffarin veut aussi limiter l'expression en anglais des patrons francophones du FMI, de l'OMC et de la BCE."

Des conneries, Raffarin en fait c'est indéniable. Toutefois, émettre l'idée que le français devrait être exclu des grandes institutions internationales est un non-sens. Et Raffarin l'a compris. Ainsi, lorsque Jean Claude Trichet arriva à la tête de la BCE grâce (ou à cause) des pressions provenant de Chirac et du Quai d'Orsay, il déclara "I'm not a French man" (qui lui valu d'ailleurs très justement le prix de la carpète Anglaise). C'est à cause de remarques comme ça que le Français se replie partout dans le monde. Que des grandes institutions soit menées par des Français qui nient presque leur propre langue, c'est quand même très fâcheux. Il apparait clair que les expressions anglaises en tout genre sont en train de tuer le français à petit feu. Ce qu'il y a d'étrange, c'est sa capacité à juger une langue. En quoi par exemple, dire hello serait t-il plus moderne que de dire bonjour? Si la langue française ne connaît pas le mot Smartphone, pourquoi essayer de l'imposer ?

"Si les Français veulent exister dans le monde d'aujourd'hui, ils doivent parler anglais. En Europe, ils ont perdu la bataille de leur langue car il est acquis que l'anglais est devenu, de fait, la langue commune de l'Union européenne (47 % des citoyens de l'Union le parlent). Aujourd'hui, moins de 25 % des documents de l'UE sont rédigés en français, quand il y en avait 50 % il y a vingt ans. Sur le terrain, la réalité est plus fragile encore : le français est de moins en moins parlé en Europe et la seule culture populaire commune aux jeunes Européens, c'est désormais la culture américaine"

Ce passage est extrêmement nauséabond. Car non, justement, si les Français veulent exister, ils doivent conserver leur culture. Le grand Fernand Braudel note quelque part  "La langue française est exceptionnellement importante. La France, c’est la langue française." En d'autres termes, selon Braudel, l'identité nationale française passe avant tout par sa langue. Si l'on abandonne cet héritage pour sombrer dans ce modernisme puant, nous sombrerons indiscutablement dans la grande masse mondiale anglo-saxone. Autrement dit, nous ne deviendrons plus rien. Si ce n'est un petit pays d'environ 70 millions d'habitants largement aligné sur le modèle américain.
Deuxième argument, Martel nous explique que le français est mort dans les institutions européennes. Le lecteur habitué de ce blog le sait déjà. Mais il sait aussi que si il s'éteint, c'est à cause du renoncement de ses élites à imposer une Europe à consonance française. Nous  ne devons jamais oublier que l'Europe reste et restera toujours une construction franco-allemande basée sur la coordination entre De Gaulle et Adenauer pour lutter contre justement, cette même menace anglo-saxonne. Cependant, l'entrée de l'Angleterre dans l'UE, contre la volonté de De Gaulle dans le marché commun, et de surcroît sans aucune concession du côté Anglais marquera les débuts d'une Europe toujours plus libérale, mondialiste, et soi-disant moderne. Toutefois, les français n'ont jamais été emballés par ce mode de société: ainsi ont t-ils toujours été défiants vis-à-vis de ce modèle, fondamentalement aux antipodes de leur culture. C'est donc devant la volonté des élites mondialisées - dont Martel semble manifestement faire partie - que nos dirigeants se couchent à Bruxelles. Martel nous dit bien qu'à peine 25% des documents sont rédigés en anglais. On connaît la suite dramatique, les élites toujours de plus en plus anti-nationales pro "gouvernement mondial" lâcheront de plus en plus du terrain et laisseront les anglais infiltrer toujours plus notre culture. Pour enfin, arriver jusqu'à la mort à petit feu de la langue française dans un espace - l'Europe - dont la France est pourtant la fondatrice (!)
En outre, inutile de se glorifier de notre jeunesse de plus américanisée. Certes, les jeunes portent des Converses, mangent Mc Do (...) mais restent toujours aussi nuls en anglais. Apparemment, et n'en déplaisent aux élites, les français ne seront jamais bons en anglais. Cela dit, ce ne serait que rendre la monnaie de la pièce tant on sait que les anglais parlent à peine français. Et indubitablement, le français est bien plus complexe,  bien plus compliqué - parce que bien plus riche - à apprendre que l'anglais.


 Frédéric Martel, digne représentant des élites mondialisées.


"(...) Nos exportations de livres diminuent : à part les marchés francophones, en Belgique, en Suisse et au Québec, qui constituent à eux trois presque 60 % de nos ventes de livres, nous déclinons presque partout dans le monde"

Indiscutablement, nos exportations de livres baissent dangereusement. Mais la faute à qui ? On ne peut que se gausser devant la nullité des auteurs actuels qui envahissent nos bibliothèques: de Marc Lévy à Guillaume Musso en passant par Anna Gavalda. Ainsi, force est de constater que notre "tissu" d'auteurs français se révèle très médiocre, et que par conséquent, ils s'exportent moins. Toutefois, je ne vois pas quel auteur d'origine anglo-saxonne peut se vanter d'être un cran supérieur... Tout en sachant que les anglais n'ont jamais eu un écrivain capable de rivaliser avec les plus grands auteurs français dont l'apport historique et culturel a été immense. Bien sûr, les anglais ont eu de grands écrivains: Hobbes, Locke, Wilde. Mais que pèse ce petit nombre de grands auteurs face à ces si nombreux génies que la France a porté: Hugo, Chateaubriand, Balzac, Zola, Voltaire, Rousseau. Et lorsque Martel s'en prend au français, on ne peut que se sentir ecoeuré tant notre patrimoine littéraire est l'un des plus riche au monde. Et ce sont ces auteurs là qui ont contribué à la beauté de la langue française, langue précise, langue géniale.

"La force de l'anglais vient aussi des nouvelles technologies, Google, Yahoo!, l'iPhone et Facebook ayant été inventés par les Américains, pas par nous"

Il faudrait préciser à Martel que personne ne nie la supériorité des américains dans le domaine de l'innovation. Personne. Depuis la chute de Londres, ce sont les États-Unis qui sont désormais le cœur du capitalisme mondial plus précisément Los Angeles et sa Sillicon Valley. Ils conservent (encore) leur capacité à attirer les cerveaux du monde entier. Toutefois, je dis cela en toute logique économique et de façon totalement objective. Or, on voit bien ici la capacité concrète des élites mondialisées à sacraliser les États-Unis quoiqu'ils fassent et de manière très peu objective. Autrement dit, Martel ne manque pas de nous rappeler qui est le dominant, qui est le dominé. Pour le dire de manière plus brusque, ils inventent tout, nous  français n'inventons rien. Mais ce n'est pas si simple: certes les États-Unis innovent, mais depuis Reagan, - et Todd le raconte très bien - ils vivent au crochet du monde. Le monde produit pour eux, travaille pour eux. Symbole d'une puissance qui, peut-être achète des Iphone à tout va, mais qui est sur un déclin inéluctable. Ce faisant, nous n'avons rien à envier à une société qui se tue à petit feu, en devenant une menace pour le monde entier, comme le rappelle très justement Emmanuel Todd. Néanmoins, nous savons que le modèle anglo-saxon a été mis à mal par la crise. Alors à quoi bon apprendre une langue qui va bientôt s'éteindre elle aussi, du fait de l'émergence de la puissance Chinoise. Apprendre l'anglais alors que le modèle anglo-saxon ne sera certainement plus d'ici peu, à quoi bon ? C'est pourtant un paradoxe bien réel, mais qui n'a pas l'air de troubler Martel plus que ça.

"Quant à Nicolas Sarkozy, on a honte que, dans les sommets internationaux, il soit le seul à avoir besoin d'une oreillette".

En vérité, c'est tout le contraire ! On devrait plutôt se féliciter du fait que notre président ouvertement américanophile ne soit pas de surcroît parfaitement bilingue. Les français ont besoin au moins d'un président qui représente la Nation et donc la langue. En tout état de cause, un chef d'État français s'exprimant en anglais serait un grave contresens historique, et une défaite sans précédent. On retiendra aussi du Général de Gaulle sa méfiance vis-à-vis de l'anglais. Ainsi prononçait-t-il "bébécé" au lieu de BBC. Question de fierté sans doute. Mais aussi question de respect envers son Pays, marquant par la même, la volonté française de ne pas sombrer dans l'uniformisation engendrée par la mondialisation.

Provocant, arrogant. C'est en ces termes que nous pouvons qualifier toute cette clique d'élite mondialisée. La France est une grande nation, un grand peuple. Elle n'a nullement besoin de recevoir des directives venant de technocrates apatrides non-élus, elle n'a, a fortiori aucunement besoin non plus de leçons venant d'élites mondialisées, dont la seule mission est de faire croire que la France n'est plus rien, pour mieux lui faire accepter l'uniformisation et la standardisation. Notons que l'Union européenne n'est qu'une marche de ce que les élites veulent: un monde sans Nation et avec le marché comme norme sociale et économique.
Quant à la langue française, elle est presque à elle seule le symbole de notre immense culture, tant sur le plan historique que littéraire. Elle est notre bien commun à tous, n'en déplaisent à ces donneurs de leçons.


dimanche 4 juillet 2010

Du problème des retraites

Si on ne réforme rien, c'est le chaos. Si on ne fait rien, on va à la ruine. Si on ne fait rien avant 2050, c'est 100 milliards de déficit. Ces quasi slogans relayés avec ardeur par les médias ne sont pas sans rappeler leur propagande de 2005 avec le Traité de Lisbonne. Français si vous ne dîtes pas OUI, c'est le chaos !
Et pour cause, dans cette réforme, que je serais plus tenté de qualifier de réformette est très loin de résoudre les problèmes auxquels nous sommes confrontés. Faisant pour l'instant fi de la pénibilité du travail, faisant aussi fi des régimes spéciaux de retraites le gouvernement s'est lancé dans une réforme incomplète. Toutefois, on peut mettre au crédit du gouvernement de n'avoir jamais évoqué le régime par capitalisation pourtant ouvertement  souhaité par des quotidiens comme Le Figaro.

En tout état de cause, le régime par répartition subit une crise de financement, mais aussi une crise politique du fait d'une individualisation de la société. Doit-on pour autant abandonner ce système, instauré il y' a plus d'un siècle et demi par Bismarck afin d'unifier l'Allemagne? Il favorise la solidarité entre les générations, et donc l'unification - voire la consolidation - d'une nation: l'alsacien cotisant pour le breton, le savoyard cotisant pour le normand. Enfin, il garantit un revenu pour tous les retraités.
Comparons maintenant au régime par capitalisation. Celui-ci mène clairement vers une marchandisation des retraites, lesquelles peuvent se retrouver quasi nulles dès lors que les bourses chutent. Dans un contexte de crise mondiale, ou les marchés boursiers se révèlent très volatiles, on ne peut pas placer toute son épargne au risque de tout perdre. Ainsi la crise asiatique de 1997 a t-elle ruiné des milliers d'épargnants américains...  En outre, quelle sera la réelle valeur des actions si 1 milliard de chinois et d'indiens seraient obligés de placer leur épargne en bourse ? Déjà bien peu représentatifs de la réalité économique, les marchés boursiers en seraient complètement déconnectés ! Ce faisant, le régime de retraite par capitalisation n'est absolument pas une réponse crédible à la crise du régime des retraites, mieux: elle est détestable.

Mais alors comment pouvons nous expliquer cette quasi faillite du système par répartition? Évidemment, on a toujours l'argument démographique: moins d'actifs pour plus d'inactifs. De telle sorte qu'en 2050, il n'y aura plus que 2 actifs pour financer une retraite. Y a t-il une autre explication ? Fort peu suspecte de bolchévisme, la Commission européenne nous dit que la part des salaires dans l’ensemble de l’économie française est passée de 66,5 % en 1982 à 57,2 % en 2006, soit une baisse de 9,3 points de PIB. Or, notre système, basé sur des cotisations sociales adossées au travail ne peut plus tenir du fait d'un partage de valeur ajoutée de plus en plus en défaveur du travail. Par ailleurs, nous pouvons en déduire 2 autres choses: d'une part, la retraite à 60 ans, était rendue possible par un taux de cotisation et une démographie favorable, et d'autre part, celle-ci relevait indiscutablement d'une mesure dite de "justice sociale" par Pierre Mauroy, Premier ministre de l'époque. Elle l'était à mon sens, uniquement dans la mesure ou elle concernait la génération touchée par la Seconde Guerre mondiale. Mais depuis lors, il est évident que l'âge légal de départ à la retraite doit être repoussé. De la même manière, les régimes spéciaux doivent clairement être abrogés. Par soucis d'égalité, le public doit avoir le même régime que le privé, surtout lorsque l'on sait le nombre d'avantage supplémentaire qu'ils ont: sécurité de l'emploi notamment. 

Aussi, Xavier Bertrand nous explique doctement qu'il ne faut pas taxer ou baisser les pensions des retraités pour la bonne et simple raison que "ce sont eux qui consomment". La consommation étant notre moteur actuellement, il convient de ne pas augmenter l'impôt. Or, c'est une erreur de diagnostic manifeste. Les "vieux" sont ceux qui par définition ont accumulé toute leur vie. Ceux là même qui sont parti à la retraite à 60 ans, qui ont connu la croissance incroyable des 30 Glorieuses. Les taxer à coup de CSG reviendrait à les faire payer eux aussi, ce serait une mesure juste. N'oublions pas les "vieux" ne consomment pas tout, ils se constituent souvent une épargne que les jeunes entrant dans la vie active n'ont souvent pas. En faisant participer les "vieux", nous pourrions rendre du pouvoir d'achat au ménages actifs. Mais pourquoi le gouvernement ne le fait t-il pas ? Clairement parce que ce sont ces mêmes "vieux" qui ont participé au succès de Nicolas Sarkozy en 2007. En conséquence, le gouvernement trouve de fausses bonnes excuses pour exclure ces mêmes vieux de tout effort. Bruno Palier, chercheur au CNRS, appelle ça l'égoïsme des baby-bommers. Et on ne saurait lui donner tort. Enfin, outre la langue de bois de X.Bertrand, il y a aussi - et il convient de le souligner -, les mensonges de la publicité du gouvernement concernant les retraites. D'une part, elles ont couté 8 millions au contribuable, et d'autre part elle ne dit pas la vérité. Que nous dit-elle ? En 2018, le système sera en équilibre. Toutefois, ce que la pub ne dit pas, c'est qu'il sera en équilibre si et seulement si le pays est en situation de plein emploi. Autrement dit, en dessous de 5%... Cette prévision est assez cynique, surtout quand on sait que le mal français, c'est le chômage de masse contre lequel François Mitterand déclarait "avoir tout essayé pour le combattre".

Dès lors, comment faire pour pérenniser le système ? Les démagogues socialistes - si l'on m'autorise ce pléonasme - disent qu'il faut taxer le capital. Toutefois, ce serait faire une grave entorse à la sacro-sainte libre circulation des capitaux: pierre angulaire de la "construction européenne". Ainsi, quelle serait la réaction de la Commission de Bruxelles lorsqu'elle apprendrait que le gouvernement français souhaite taxer le capital ? On se souvient du triste épisode de Renault ou, malgré la volonté de Sarkozy, Bruxelles a immédiatement crié au scandale protectionniste. De plus, de quel capital s'agit t-il ? Des plus-values boursières ? Des transactions bancaires ? De l'épargne ? Bref, taxer le capital, mais quel capital ? Taxer les riches, oui mais à partir de combien sommes-nous riches ? A bien des égards, il manque ici une définition claire des termes employés. En tout état de cause, taxer les plus-values boursière, c'est se tirer une balle dans le pieds. La place de Paris étant déjà bien moins "compétitive" que celle de Londres, taxer ses transactions ferait fuir les investisseurs, ces derniers allant au plus rentable.

Il nous reste une donc une solution: la croissance. Souvent créatrice d'emplois, de consommation et donc, de revenus pour les caisses des divers organismes de l'État, elle est la clé de voûte du retour à l'équilibre tout aussi bien sur le financement de nos retraites. Néanmoins, voilà qu'une vague de rigueur s'abat sur l'Europe. Ainsi, il ne faudra compter sur les ménages pour consommer, ceci vont se tourner vers une épargne de précaution, peut propice à un retour à la croissance, à l'emploi, et donc à une augmentation des cotisations des retraites... Nous pourrions toutefois utiliser le levier monétaire. Mais non: nous n'avons plus la maîtrise de notre monnaie, et, étant (encore) sur-évaluée, elle ne permet pas de dégager de forts excédents commerciaux qui pourraient créer la aussi de l'emploi sur le territoire national.
Outre les problèmes économiques et démographiques, la réforme des retraites pose à mon sens un problème  philosophique. Pendant des années, les Hommes ont été contraints à des journées de travail inhumaines. Inutile de réécrire Germinal de Zola, mais dans ce cas, l'Homme a réussi à accroître sa productivité. Dit autrement,  nous produisons plus, et plus vite. A fortiori en France où notre productivité est l'une des plus élevée au monde. Sans forcément dire que je sois d'accord avec cet argument, force est de constater que c'est une problématique importante, et qu'il convient de ne pas l'écarter d'un revers de main: sommes-nous condamnés à travailler plus longtemps, alors que nous produisons mieux, et plus vite ?




Les syndicats peuvent protester, mais rien ne changera: le cadeau qu'avait fait Mauroy aux travailleurs ayant connu la guerre relevait bien d'une mesure de "justice sociale" pour cette génération uniquement. Le programme du parti socialiste est à cet égard insensé: taxer le capital alors que c'est un certains Jacques Delors qui lui a donné toute sa liberté au sein de l'UE paraît un brin démagogique. En tout état de cause, le gouvernement surf lui sur une vague de lieux communs et de mensonges pour mieux faire passer la réforme. Au total, nous assistons à une réforme bien incomplète et qui une nouvelle fois, révèle l'incapacité concrète d'une gauche de proposer sans parler de "taxe(s)", et d'un gouvernement aux ordres des marchés.